L'Europe reste décidée à se doter d'une taxe Gafa

06 juillet 2021


L'accord en vue à l'OCDE sur l'imposition minimale des multinationales n'entame pas la volonté de l'UE de se doter, en complément, d'une taxe numérique, dont le champ serait plus large.

Bruxelles veut le fromage et le dessert. Dès vendredi, dans la foulée de l'annonce d' un accord à l'OCDE entre 130 pays , dont 24 de l'Union européenne, pour la mise en oeuvre d'un taux minimal d'imposition des sociétés de 15 %, Margrethe Vestager, la vice-présidente exécutive de la Commission européenne, en charge de la concurrence et du numérique, a affirmé que l'Union européenne poursuivrait son projet de taxe centrée sur les entreprises du numérique, communément appelée « taxe Gafa ».

Des centaines d'entreprises visées

Margrethe Vestager doit s'entretenir du sujet ce mardi avec Janet Yellen, la secrétaire d'Etat américaine au Trésor . La date du 20 juillet est évoquée pour la présentation à Bruxelles par la Commission européenne d'un nouveau projet européen de taxe numérique. Ce calendrier pourrait toutefois évoluer face aux difficultés techniques et politiques à finaliser la proposition. En tout état de cause, un tel projet de taxe Gafa européenne a été avalisé par les Vingt-Sept au Conseil de longue date et ne disparaît pas automatiquement avec l'accord OCDE sur l'impôt minimal. « Il faut voir dans quelle mesure le numérique est couvert par l'accord de l'OCDE ou non », explique une source européenne.

Pas de double imposition

« Alors que l'accord de l'OCDE concerne les cent plus grandes entreprises, celui-ci (NDLR : la taxe numérique) concerne beaucoup, beaucoup plus d'entreprises », a expliqué vendredi Margrethe Vestager à l'agence de presse Reuters. Selon nos informations, la Commission européenne a indiqué aux Etats membres travailler à un projet « qui complète l'accord à l'OCDE et reste compatible avec celui-ci ». « Il y aura une taxe numérique européenne en plus de l'accord OCDE », abonde une source européenne proche du dossier. Le taux d'imposition retenu devrait être inférieur aux 15 % définis pour l'imposition minimale et Bruxelles travaille à un système visant à « éviter la double imposition », explique-t-on.

Cette future taxe Gafa doit venir alimenter, tout comme la future taxe carbone aux frontières également en préparation, le budget européen. A fortiori dans un contexte où Bruxelles devra rembourser sur la durée les quelque 390 milliards d'euros de subventions aux Etats que l'UE va emprunter dans le cadre du plan de relance adopté en réponse à la crise sanitaire. Aujourd'hui, les ressources propres de l'UE, à savoir les droits de douane et une part de la TVA collectée par chaque Etat, ne représentent plus que 28 % du budget communautaire, une part en baisse constante.

Le mur de l'unanimité

Si le projet, en branle depuis plus de trois ans et fortement soutenu par Paris, a désormais gagné en maturité politique, il risque toutefois de se heurter aux mêmes difficultés qui l'ont empêché jusqu'ici d'aboutir : comme toute réforme fiscale au sein de l'Union, il nécessitera l'unanimité des 27. En la matière, l'opposition de l'Irlande, qui a longtemps bloqué la taxe Gafa européenne, à l'accord négocié la semaine dernière à l'OCDE, ne constitue pas un signal encourageant.

Par Derek Perrotte

Publié le 5 juil. 2021  - Les Echos

https://www.lesechos.fr/monde/europe/leurope-reste-decidee-a-se-doter-dune-taxe-gafa-1329591